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pousser ainsi le temps, comme l’on dit, avec l’épaule. Mascur.

ÉPAULÉE, s. f. Effort qu’on fait de l’épaule pour pousser quelque chose. On a remué cette poudre par épaulées. On dit, Faire une chose par épaulées, c’est-à-dire, à diverses reprises & négligemment, sans soin d’avancer le travail. Per intervalla, nisu interrupto, operâ interruptâ. On le dit surtout des murs & des fondemens qu’on n’élève pas par-tout en même temps à même hauteur, ni tout de suite au niveau ; mais à diverses reprises.

On appelle aussi à la Boucherie, Epaulée, le quartier de devant du mouton d’où on a retranché l’épaule.

ÉPAULEMENT, s. m. Terme de fortification. C’est une espèce de rempart faite à la hâte pour se couvrir de côté, soit qu’on la fasse de terres remuées, soit de gabions, fascines, ou de sacs de terre, pour couvrir le canon, ou pour se mettre à l’abri. Munitio extemporanea. On fait des épaulemens aux places d’armes qui sont à la queue de la tranchée. On leur faisoit quelque épaulement à l’épreuve du canon, s’il n’y en avoit point de naturel. Bussi Rabutin.

Épaulement, se dit aussi des orillons quarrés qu’on faisoit autrefois aux bastions sur le flanc auprès de l’épaule pour couvrir la casemate.

Épaulement, est pris quelquefois pour demi-bastion composé d’une face & d’un flanc, qui se met à la pointe d’un ouvrage à corne ou à couronne. On le dit aussi d’un petit flanc qu’on ajoûte aux côtés d’un ouvrage à corne pour les défendre quand ils sont trop longs.

Épaulement, se dit aussi des redens qu’on fait sur une ligne droite pour la fortifier.

Épaulement. Terme de Charpenterie. On appelle épaulement d’un tenon, une partie & un des côtés du tenon, qu’on diminue moins que l’autre, afin que la piéce de bois en ait plus de force.

ÉPAULER, v. act. Démettre, disloquer une épaule. Humerum frangere. Voilà un trou dangereux, capable d’épauler un cheval. Épauler, signifie aussi à la Guerre, Faire un épaulement, se couvrir de côté. Munire, tueri. On dit aussi, Epauler son camp d’une colline, d’un rideau, d’un bois, d’un marais, pour dire, S’en couvrir ensorte qu’on ne puisse être attaqué de ce côté-là.

Épauler, signifie aussi, Appuyer. Sustentare. Les espaliers sont toujours épaulés d’un mur. Morin, Traité des Fleurs.

Épauler, signifie figurément en Morale, Assister, secourir. Juvare, adesse, auxiliari. Cet homme n’a pas fait une si hardie entreprise sans être bien épaulé, bien soutenu des Puissances. Il est bas en ce sens.

Épaulé, ée. part. pass. & adj. Munitus, tutus, adjutus. Cheval épaulé. Humeris fractus.

On appelle une fille qui a forfait à son honneur, Une bête épaulée, dont on ne fait plus grand cas. Expression populaire.

ÉPAULETTE, s. f. La partie d’un corps de jupe qui passe par dessus l’épaule, & où on attache des manches. Humerale. C’est aussi la petite bande de toile qui est sur l’épaule de la chemise. C’est encore le ruban que les Religieuses attachent sur l’épaule, & qui est attaché au scapulaire.

ÉPAULIÈRE, s. f. La partie de l’armure d’un Cavalier qui couvre & défend l’épaule. Nicot prend aussi épaulière, ce que les Italiens appellent spalltera, pour une espèce de tapisserie d’une ou de deux aunes de haut au plus, qu’on tend en Italie dans les salles & chambres, où l’on a coutume de s’asseoir. On l’appelle épaulière, parce qu’elle ne va guère que jusqu’à la hauteur des épaules : son usage est d’empêcher que les habits de ceux qui sont assis ne se gâtent contre la muraille. On l’appelle en Latin postergale, mais ce mot n’est pas bon Latin. Stragulum aussi est trop général. Nicot l’appelle stragulum humerale.

ÉPAUNE, s. f. Nom propre d’une ancienne ville de France, qui n’est connue que par un Concile qui y fut tenu en 517. sous Sigismond Roi de Bourgogne. Voyez Epone.

Quelques Auteurs s’imaginent que ce nom Epona fut donné à ce lieu, parce qu’il étoit consacré à la Déesse Epone, & qu’elle y étoit adorée. Voyez sur ce lieu le P. Labbe, Diss. philol. de Conc. Epaun. Chifflet, Dissert. De loco legit. Concil. Epaun. Chorier, Hist. de Dauphiné, T. I. p. 582.

ÉPAURE, s. f. Terme de Charpenterie. On appelle épaures, certaines solives qui servent à faire la levée d’un bateau foncet, & autres.

ÉPAUTIER, v. a. Vieux mot. On a dit, Épautier les arbres, pour dire, En ôter le bois inutile.


EPE.

ÉPEAUTRE, ou ÉPEAUTE, s. m. Le premier est plus usité. Arinea, zea. On nomme épeautre dans quelques provinces du Royaume une espèce d’orge dont l’épi n’a que deux rangs de semences, ce qui l’a fait appeller en Latin hordeum distichum. L’épeautre est une plante qui est fort semblable au froment, mais qui a son tuyau plus mince, plus ferme & plus court. Son épi, qui fleurit environ la fête de S. Jean-Baptiste, est aplati : il n’est point barbu le plus souvent ; & quelquefois il l’est. Ses grains sont disposés seulement de deux côtés, deçà & delà : ils sont joints deux à deux, & enfermés dans leur base, d’où on ne peut les séparer que difficilement. En Latin, zea dicoccos, vel zea major. Il y a une autre espèce d’épeautre qui a le tuyau & l’épi plus petit, & les grains rangés un à un. En Latin zea briza dicta, seu monoloccos Germanica. M. de Tournefort l’a rangée sous le genre des orges, & il l’appelle hordeum distichum, spica nitida, seu briza nuncupatum, Instit. rei Herb. 513. L’épeautre a été autrefois fort estimée en Italie. Les Anciens en faisoient la fromentée, qui étoit une bouillie dont ils faisoient grand état. Les Allemands en font à présent du pain, qui n’est pas moins blanc que celui du froment ; mais il n’est pas si nourrissant, il est difficile à digérer, & n’a pas le goût & les qualités du pain ordinaire. Théophraste dit que l’épeautre étant semée se change en froment, non pas la première année, mais la troisième.

Quelques-uns appellent l'épeautre blé locular, ou locar.

ÉPÉE, s. f. Arme offensive qu’on porte au côté, qui perce, pique & coupe, & qui est en usage chez presque toutes les nations. Ensis, gladius. Elle est faite d’une lame de fer tranchante & pointue, avec une garde, une poignée & un pommeau. Les sujets n’ont point droit de tirer l’épée contre le Souverain : ils ne peuvent s’en servir que par l’ordre de celui qui la porte par l’ordre de Dieu. Nic. Les Sauvages du Mexique avoient des épées de bois garnies de pierres, qui n’étoient pas moins dangereuses que les nôtres. En Espagne il n’y a des épées que d’une certaine longueur : elles sont marquées pour cela. Les Scythes adoroient Mars, mais ils n’avoient point de statue de ce Dieu ; une épée leur en servoit.

Ce mot vient, selon Nicot, du Latin spata, qui est un vieux mot Gaulois, que Bochart dérive de l’Hébreu sbatim, qui signifie un bâton.

Les Maîtres en fait d’armes divisent l’épée en trois parties, en haute, moyenne & basse ; en fort, mi fort & en foible. Le fort de l’épée est la partie la plus proche de la garde. Le mi fort gît au milieu & aux environs de la lame. Et le foible est le reste qui va jusqu’à la pointe. Ils divisent de même le corps en trois, dont la partie haute comprend la tête, la gorge & les épaules ; la moyenne est la poitrine, l’estomac & le ventre supérieur ; & la basse est le ventre inférieur, & au-dessous jusques vers le milieu des cuisses.