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BAT

perturbateur du repos public. Iners, ignavus, scelestus. Dans le Président Faucher, au L. 3. ch. 19 de ses antiquités Gauloises, les batteurs de pavé sont confondus avec les voleurs de grands chemins.

On appelle proverbialement des filous & des fainéans, batteurs de chemin, batteurs de pavé. Otiosus ambulator, qui surandi animo, ou causa, vicos obambulat.

BATTITURE. Voyez Batiture d’airain.

BATTOIR. s. m. Espèce de palette ; instrument fait de bois, plat & large, qui a un manche, qui sert à battre. Palmula. Il y a des battoirs pour battre la lessive. Il y en a d’autres propres pour jouer à la longue paume, dont le manche est fort long ; d’autres pour la courte paume, dont le manche est plus court.

BATTOLOGIE. s. f. Terme de Grammaire, multiplicité de paroles, affluence d’expressions superflues ou vides de sens, vice du discours, qui arrive lorsqu’on répète plusieurs fois la même chose, ou qu’on dit plusieurs choses vaines, frivoles & inutiles au sujet. Battologia, inanis repetitio. Ce mot vient de Battus, mauvais Poëte, qui par ses longueurs & ses répétitions éternelles ennuyoit tout le monde. Ovide raconte que Mercure ayant volé les bœufs du Roi Admete, gardés par Apollon, donna à Battus une vache pour l’engager dans le secret. Mercure se déguisa pour l’éprouver, & lui promit une double récompense ; aussitôt le babillard Battus lui révéla tout, & répéta même deux fois le lieu où Mercure avoit caché son vol. De-là est venu le mot de battologie.

Au ch. 6. de S. Matth. v. 7, où nous lisons dans notre Vulgate, Orantes nolite multùm loqui, il y a dans le grec un mot qui signifie, ne tombez point dans la battologie. MM. de Port-Royal ont traduit : Ne soyez pas grands parleurs dans vos prières. Les Jésuites de Paris ont mis dans leur version : En priant ne faites pas de longs discours. Le P. Amelote a traduit plus à la lettre par rapport à l’original, n’usez pas dans vos prières de grandes répétitions de paroles. En effet la battologie des Païens dans leurs prières ne consistoit pas tant en de longs discours, que dans une longue répétition des mêmes mots.

☞ BATTRE. v. a. Cædere, verberare, percutere. Je bats, tu bas, il bat : nous battons, vous battez, ils battent. J’ai battu. Je battis. Je batterai. Bats. Que je batisse. Battant. Donner des coups à quelqu’un, redoubler les coups.

☞ Il semble que pour battre, il faille redoubler les coups, & que pour frapper il suffise d’en donner un. On n’est jamais battu qu’on ne soit frappé. Mais on peut être frappé sans être battu. Le plus fort bat le foible. Le plus violent frappe le premier. l’Abbé Girard. Syn.

Battre, suppose toujours de l’intention : on peut frapper sans le vouloir, Voyez Frapper.

Frapper est toujours un verbe actif. Battre reçoit un sens neutre dans se battre. Voyez plus bas Se Battre.

Ce mot vient du latin batuo, batuis, selon Nicot, Ménage & Du Cange, qui proprement signifioit l’exercice des Gladiateurs, qui se faisoit avec un bâton ou épée de bois, ou un fleuret de fer. De-là vient aussi bataille. Ferrarius, de Gladiatoribus, On a dit battidere pour batuere ; il se trouve dans les Lois Saliques, Tit. 36, & battere. Le premier, dit Chifflet, étoit un terme militaire, & l’autre romain, ou venu du romain, Romanicum. C’est de ces mots que s’est formé battre. Mais, selon Guichard, battuo & battre vienent de l’hébreu הבט qui signifie excutere fructus ex arbore, vel frumenta aut legumina ex foliculis, c’est-à-dire, battre un arbre pour en faire tomber les fruits, ou le blé, ou des légumes, pour faire tomber les grains de leurs gousses. ☞ On bat les noyers avec la gaule pour en recueillir les noix.

Battre, signifie aussi, défaire des troupes assemblées en un corps. Fundere, cædere, profligare. Les petites armées battent bien souvent les grandes. Samson battit les Philistins avec une mâchoire d’âne.

Battre, signifie encore en termes de guerre, attaquer avec de l’artillerie. Quatere, verberare. Une armée que le canon bat en flanc est bientôt défaite. On a battu Rhodes avec cent pièces de canon.

Battre en brêche, c’est ruiner à coups de canon le revêtement ou le rempart de quelqu’ouvrage, pour y faire une ouverture par laquelle on puisse y entrer.

Battre en ruine une ville, c’est en détruire les édifices avec le canon & les bombes. En ce sens on le dit figurément des personnes qu’on poursuit jusqu’à l’extrémité, & des disputes où l’on apporte de si bonnes raisons qu’elles détruisent absolument le parti contraire.

Battre par camarade, quand plusieurs pièces de canon tirent tout à la fois sur le même ouvrage, soit qu’elles soient de diverses batteries, soit qu’elles soient de la même.

Battre en salve, c’est tirer toutes à la fois les différentes pièces d’une batterie avec lesquelles on bat un ouvrage en brèche. Voyez au mot Batterie.

Battre, se dit aussi en parlant du tambour. Battre la caisse, Tympanum tundere, c’est assembler les soldats, ou les enrôler.

Battre aux champs, quand l’armée est en marche. On bat aussi aux champs, pour faire honneur aux généraux.

Battre l’assemblée, ou la générale ; la diane, ou le veil, la marche, pour donner le signal de tous les mouvemens militaires. Battre la chamade, lorsque dans une ville assiégée, on bat le tambour pour marquer qu’on veut capituler.

Battre l’estrade, envoyer des cavaliers dans la campagne, pour aller aux avis & découvrir l’ennemi. Excurrere, concursare. Battre la campagne, faire des courses sur les terres des ennemis & les ravager. On dit figurément d’un Orateur, d’un Ecrivain, qu’il bat la campagne, qu’il bat bien du pays, pour dire, qu’il s’égare, qu’il s’éloigne de son sujet. Vagari, deflectere à proposito. On le dit aussi d’un Orateur à qui la Mémoire manque, & qui s’accroche où il peut.

Battre, signifie aussi, tourmenter, agiter, secouer. Agitare, pulsare, concutere, jactare. Ce navire a été battu de la tempête. Ces fruits ont été battus du mauvais vent. Toute cette côte a été battue de l’orage.

On le dit à-peu-près en ce sens, en termes d’Agriculture & de Jardinage même, des pluies, des grands agastes d’eau, & des arrosemens abondans, qui foulent les terres & les rendent plus dures. Voilà des terres qui ont été bien battues de pluies. Les grandes eaux ont battu ces terres, de manière qu’on diroit que le dessus n’est qu’une croûte. Liger.

Battre, est neutre quelquefois, comme dans ces exemples. Ce malade est bien bas, son pouls ne bat plus. Arteria non micat. Quelquefois l’artère ne battra pas de coup, mais s’enflera peu à peu. P. Le Comte. Le cœur bat étant hors du corps de l’animal. Conpalpitat. On dit même dans un sens figuré, que le cœur bat pour dire, qu’on tremble de peur.

Monseigneur, en ce triste état,
Confessez que le cœur vous bat. Voit.

On dit aussi qu’un cheval bat du flanc, quand il est poussif. Ducere, trahere ilia ; & que le fer d’un chevalbat, pour dire, qu’il loche. Acad. Fr. Qu’une montre bat encore, lorsque la fusée n’est pas encore au bout.

Battre, se dit aussi neutralement en termes de Musique, lorsque deux tons, après avoir été différens & dissonans, viennent à s’accorder. Consonare, concordare. Le son des tuyaux d’orgues ensemble doit avoir plus de force, quand leurs vibrations, après avoir été quelque temps séparées, viennent à se réunir, & s’accordent à frapper l’oreille d’un même coup. Il semble que l’expression commune des Musiciens, qui disent que les tuyaux battent, quand leur son se redouble ainsi, ait son origine dans cette idée. Acad. des Sç. 1700. Hist. pag. 134. Quand les tuyaux approchent de l’unisson, il y a sur un plus grand nombre de vibrations séparées, moins de vibrations qui se rencontrent & qui battent.

Battre, se dit encore pour donner sur quelque chose. Imminere. Le soleil bat à-plomb dans la zone torride. Le soleil battoit à-plomb sur la terre. Ablanc.