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NICOLAS NICKLEBY.

Tom répondit par une grimace, et désigna Nicolas du bout de sa plume.

— Maintenant, Monsieur, dit la dame, qu’y a-t-il pour votre service ?

Nicolas répondit brièvement qu’il désirait savoir s’il y avait un emploi de secrétaire vacant.

— S’il y en a ! il y en a une douzaine ; n’est-ce pas, Tom ? — Je suis disposé à le croire, répondit le jeune commis ; et en disant ces mots, il adressa à Nicolas un clignement d’yeux avec une familiarité qu’il pensait devoir être flatteuse, mais que l’ingrat Nicolas accueillit avec mépris.

En examinant le livre, on reconnut que la douzaine d’emplois de secrétaire se réduisait à un seul. M. Gregsbury, le fameux membre du Parlement, à Westminster, demandait un jeune homme pour mettre en ordre ses papiers et sa correspondance, et Nicolas était justement l’espèce de jeune homme que M. Gregsbury demandait.

— J’ignore les conditions, fit observer la dame corpulente, car il a dit qu’il les réglerait avec celui qui se présenterait ; mais elles ne sauraient être mauvaises, parce que c’est un membre du parlement.

Dans son inexpérience, Nicolas trouva ce raisonnement logique et cette conclusion judicieuse ; sans se donner la peine de faire de nouvelles questions, il prit l’adresse et résolut d’aller trouver sans délai M. Gregsbury. Il arriva promptement chez cet éminent personnage : c’était un homme replet, à physionomie dure, à tête grosse, à voix forte, à manières fastueuses, ayant à ses ordres un nombre suffisant de phrases insignifiantes, enfin possédant toutes les qualités requises pour faire un excellent député.

M. Gregsbury jeta un gros paquet de papiers dans un panier d’osier placé à ses pieds, et se renversa sur un fauteuil, en écoutant les offres de Nicolas.

— Vous voulez être mon secrétaire ? lui dit-il. — Je désire être employé en cette qualité. — Eh bien ! que savez-vous faire ? — Je suppose, répondit Nicolas en souriant, que je connais la besogne qui échoit ordinairement aux secrétaires. — En quoi consiste-t-elle ? — Les devoirs d’un secrétaire, repartit Nicolas, sont assez difficiles à définir. Ils comprennent, je le crois, la correspondance. — Bien. — L’arrangement des journaux et pièces diverses… — À merveille. — Parfois peut-être il faudra écrire sous votre dictée, copier vos discours importants pour les envoyer aux journaux. — Certainement, et puis ? — Vraiment, dit Nicolas après un moment de réflexion, je ne saurais présentement récapituler les autres devoirs d’un secrétaire, en général, il doit se rendre aussi utile et aussi agréable que possible en