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taine danseuse ma chère… jusqu’à ce que notre propre maison soit meublée et arrangée. Autre chose encore, Amy. Papa ayant toujours l’intention d’aller lui-même à Londres au printemps, si le mariage a lieu ici, Edmond et moi nous partirions pour Florence, où papa pourrait nous rejoindre dans quelques semaines, et nous voyagerions tous trois de compagnie jusqu’à Londres. M. Merdle a pressé papa d’habiter durant son séjour la maison en question, et je présume que papa acceptera. Mais il est le maître, et sous ce rapport (peu importe d’ailleurs), je ne puis rien affirmer. »

La différence qu’il y avait entre papa, qui était bien le maître, et M. Sparkler, qui n’était pas le maître du tout, ressortait clairement de la façon dont Fanny établissait les faits, mais sa sœur fit peu d’attention à ce contraste ; elle était partagée entre le regret que lui causait une séparation prochaine et celui de n’être pas comprise dans ce projet de voyage à Londres.

« Et ce sont là tes arrangements, Fanny ?

— Arrangements ! répéta Fanny. En vérité, mon enfant, tu es fièrement agaçante. Tu sais que j’ai eu soin de ne rien dire qui pût faire supposer qu’il y eût rien d’arrêté. Ce que j’ai dit, c’est qu’il se présente certaines questions, et je t’ai énuméré ces questions. »

Le regard calme et rêveur de la petite Dorrit rencontra celui de Fanny.

« Maintenant, ma petite chérie, continua Fanny, balançant son chapeau par les brides d’un air d’impatience, il ne s’agit pas d’ouvrir de grands yeux comme un petit hibou, à quoi ça sert-il ? J’ai besoin de tes conseils. Que me conseilles-tu ?

— Ne crois-tu pas, Fanny, demanda la petite Dorrit d’un ton persuasif après avoir hésité un peu, que ce qu’il y aurait de mieux à faire, ce serait de retarder le mariage de quelques mois ?

— Non, petite tortue, riposta Fanny avec beaucoup de vivacité, je crois tout le contraire. »

Sur ce, elle lança son chapeau loin d’elle et se jeta dans un fauteuil. Mais l’instant d’après elle redevint très-affectueuse ; se levant d’un bond et s’agenouillant par terre, elle entoura de ses bras sa sœur et la chaise sur laquelle elle était assise.

«  Ne va pas croire que je suis en colère ou méchante, ma chérie, parce qu’il n’en est vraiment rien. Mais tu es un si drôle de petit corps ! Tu ferais damner un saint. Ne t’ai-je pas dit, enfant que tu es, qu’on ne peut pas avoir assez de confiance dans Edmond pour le laisser partir seul ? Ne sais-tu pas cela toi-même ?

— Oui, oui, Fanny, je sais que tu me l’as dit.

— Et je sais que tu sais que j’ai eu raison de le dire, riposta Fanny. Eh bien ! ma chère enfant, puisqu’il est impossible de le laisser partir seul, il s’ensuit, je suppose, que je dois partir avec lui.

— Mais… oui, chère Fanny, répliqua la petite Dorrit.

— Maintenant que tu connais les arrangements nécessaires pour