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siège et regarda autour de lui avec un air de désappointement, ne pas vous trouver seul.

— Ah vraiment ? répliqua le Patriarche d’un ton suave. Ah vraiment ?

— C’est ce que je vous ai dit, papa, vous savez bien, s’écria Flora.

— Ah oui ! répondit le Patriarche. C’est juste. Ah oui !

— Oserais-je vous prier, demanda Clennam avec inquiétude, de me dire si Mlle Wade est partie ?

— Mademoiselle… ? Oh ! vous lui donnez le nom de Wade, répondit M. Casby. C’est très-convenable. »

Arthur répliqua vivement :

« Et vous, quel nom lui donnez-vous ?

— Wade, répondit M. Casby. Oh ! je ne l’appelle pas autrement. »

Après avoir contemplé le visage philanthropique et les longs cheveux blancs et soyeux de M. Casby, qui faisait toujours aller ses pouces et adressait au feu un sourire plein de bienveillance, comme s’il désirait seulement que ce feu pût le brûler, afin de lui donner l’occasion de lui pardonner charitablement, Arthur commença :

« Je vous demande pardon, monsieur Casby…

— Du tout, du tout, interrompit le Patriarche, du tout.

— Mais Mlle Wade avait avec elle une bonne… une jeune personne qui a été élevée par des amis à moi, et sur laquelle sa nouvelle maîtresse ne semble pas exercer une influence des plus salutaires. Je désire vivement être à même de faire savoir à mes amis que cette jeune fille n’a pas perdu tout droit à l’intérêt qu’ils lui portent encore.

— En vérité, en vérité ? répliqua M. Casby.

— Seriez-vous donc assez bon pour me donner l’adresse de Mlle Wade ?

— Que c’est donc dommage ! comme c’est malheureux ! si vous m’aviez seulement demandé cela pendant qu’elles étaient encore ici. En effet, j’ai remarqué la personne en question, monsieur Clennam. Une jeune fille au visage un peu coloré, monsieur Clennam, avec des cheveux et des yeux très-noirs, si je ne me trompe,… si je ne me trompe ? »

Arthur lui expliqua qu’il ne se trompait pas, et répéta avec une nouvelle expression d’inquiétude :

« Seriez-vous assez bon pour me donner leur adresse ?

— Là, là, là, quel dommage ! s’écria le Patriarche d’un ton de doux regret. Quel dommage ! Je n’ai pas leur adresse, monsieur. Mlle Wade habite presque toujours à l’étranger, monsieur Clennam. Depuis des années elle voyage, et elle est (si je puis parler ainsi d’une sœur en Dieu et d’une dame) capricieuse et irrésolue comme il n’est pas permis de l’être. Il peut s’écouler bien des années avant que je la revoie. Je puis même ne jamais la revoir. Quel dommage ! quel dommage ! »