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Le Poirier de Misère

On décréta des guerres formidables : d’un commun accord, pour se rendre le service de s’anéantir mutuellement, les nations se ruèrent les unes sur les autres ; mais on se fit un mal affreux sans parvenir à tuer un seul homme.

On rassembla un congrès de la mort : les médecins y vinrent des cinq parties du monde ; il en vint des blancs, des jaunes, des noirs, des cuivrés, & ils cherchèrent tous ensemble un remède contre la vie, sans pouvoir le trouver.

On proposa dix millions de francs de récompense pour quiconque le découvrirait : tous les docteurs écrivirent des brochures sur la vie, comme ils en avaient écrit sur le choléra, & ils ne guérirent pas plus cette maladie que l’autre.

C’était une calamité plus épouvantable que le déluge, car elle sévissait plus longuement, & on ne prévoyait point qu’elle dût avoir une fin.


V


Or, à cette époque, il y avait à Condé un médecin fort savant, qui parlait presque toujours en latin & qu’on appelait le docteur De Profundis. C’était un très honnête homme qui avait expédié