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Contes d’un buveur de bière

Pierre qui roule n’amasse pas mousse, mais elle se polit. On voit que Jean n’avait point perdu son temps à courir le monde. Un compliment si bien tourné flatta Ludovine.

« Quels ornements ? fit-elle en souriant.

— Vous le verrez, belle princesse, quand vous en aurez goûté. On tient à vous en faire la surprise. »

La curiosité de Ludovine fut piquée au vif. Elle tira la bourse de cuir & versa sur la table autant de fois cinquante florins qu’il y avait de prunes dans la corbeille. Le petit soldat fut pris d’une furieuse envie de lui arracher son boursicaut en criant au voleur, mais il sut se contenir.

Ses prunes vendues, il plia boutique, alla se débarrasser de son déguisement, changea d’auberge & se tint coi, attendant les événements, ou, comme on dit chez nous, les aveines levées.

À peine rentrée dans sa chambre : « Voyons, fit la princesse, quels ornements ces belles prunes ajoutent à la beauté. » Et, tout en ôtant ses coiffes, elle en prit une couple & les mangea.

Vous imaginez-vous avec quelle surprise mêlée d’horreur elle sentit tout à coup son front se fertiliser ! Elle se regarda dans son miroir & poussa un cri perçant.

« Des cornes ! voilà donc ce bel ornement ! Le