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fite moins. Le vrai est qu'au contraire ils renient en mettant dans leurs mains presque toutes les af- faires, écartant la concurrence et faisant sans obstacles des profits plus forts. Les gouvernements, de leur côté, sont très portés à favoriser l'établissement de ces grandes compagnies et à leur donner des privi- lèges au détriment de leurs rivaux et du public, dans l'intention d'en tirer des prêts gratuits ou peu chers, que celles-ci ne leur refusent jamais. C'est ainsi que les uns vendent leur protection, et que les autres l'achètent. Ce serait déjà un très grand mal.

Mais ces compagnies ont un bien plus grand in- convénient : elles émettent des billets payables à vue, ne portant aucun intérêt, qu'elles donnent pour argent comptant. Tous les hommes qui dépen- dent d'elles ou y tiennent, et ils sont très nom- breux, prennent avec empressement ces billets et les offrent. Le public même, qui a grande confiance dans leur solvabilité, les reçoit volontiers comme très commodes. Ainsi ils se répandent facilement et se multiplient extrêmement. La compagnie y trouve un gain énorme, parce que toute la somme que représentent ces billets ne lui a rien coûté que la fabrication du papier, et lui profite comme argent comptant. Cependant, il n'y a pas encore d'incon- vénient, parce que les billets sont toujours réalisés dès l'instant qu'on le demande.

Mais bientôt le gouvernement, qui ne l'a créée que pour cela, demande à cette compagnie des em- prunts énormes ; elle n'ose ni ne peut le refuser,