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IROQUOISIE

tre qu’ils ont déjà assez de difficultés à se défendre contre les Iroquois, sans se battre entre eux ; l’ennemi les poursuit souvent, les bat la plupart du temps, et les suit jusque dans leurs villages. S’il apprend les divisions qui règnent actuellement, il concevra bientôt l’espérance d’assister à la ruine de la coalition laurentienne ; ce sera pour lui le moyen de « se rendre maître de leurs constrées »[1]. Les uns et les autres doivent adopter la solution qu’il leur propose ; ensuite, les Français seront bien disposés à les assister comme par le passé. Sinon, ils doivent descendre à la traite ; avec la collaboration des capitaines de navires, Champlain tentera de régler la querelle et « de donner ordre pour les garantir de leurs ennemis, à quoi il fallait penser »[2].

En un mot, Champlain éprouve des doutes quant à la solidité de la Coalition laurentienne. Il n’est pas suffisamment rassuré. Algonquins et Hurons éprouvent des défaites ; les Iroquois viennent déjà se mettre à l’affût autour des bourgades de la Huronie, comme les Algonquins et les Hurons vont se poster autour des villages iroquois, pour la petite guerre, c’est-à-dire pour surprendre quelques individus, quelques groupes hors des palissades, les massacrer ou les capturer. Champlain peut les abandonner à leur sort. Mais alors adieu le commerce des pelleteries, adieu la Nouvelle-France.

Champlain acquiert des connaissances précieuses au cours de ce voyage de près d’une année. Sa description de la Huronie est très complète. Ce pays lui rappelle invinciblement la Bretagne. Il compte dix-huit hameaux, dont six sont enclos de palissades à triple rangs supportant une galerie au faîte. Les Hurons comptent environ deux milles guerriers, soit un peu moins à eux seuls que les Iroquois. Ces derniers leur livrent une guerre sans merci. Les Onnontagués, par exemple, les ont forcés à reculer leur frontière orientale de quarante à cinquante lieues ; ils les ont refoulés dans le nord-ouest de la péninsule. Le rétrécissement graduel de la Huronie est commencé

  1. Œuvres de Champlain v. 3 p. 110.
  2. Idem, v. 3, p. 113.