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IROQUOISIE

comme aussi la rivière des Iroquois »[1]. Et le mot « sauvages », indique probablement les Algonquins, comme le soutiendra un chef de l’île des Allumettes, du haut du Mont-Royal, un après-midi de dimanche de l’an 1642. La guerre a dépeuplé le Richelieu, le lac Champlain, comme elle a dépeuplé le Saint Laurent.

Champlain demeurera trois semaines sur le lac, explorant pour la France. Le danger grandit à mesure que la flottille descend vers le sud. Un soir, vers dix heures, au bout d’une pointe, elle se trouve soudain face à face avec un gros d’ennemis Iroquois et Algonquins poussent en même temps leurs clameurs de guerre. Les premiers atterrissent. Les seconds poussent au large dans l’obscurité ; ils laissent porter, les canots rangés flanc contre flanc et consolides en un bloc solide par des perches. Mais ils se tiennent à peu de distance du rivage. Ils écoutent l’ennemi qui commence « à abattre du bois avec des méchantes bâches qu’ils gagnent quelquefois à la guerre, et d’autres de pierre, et se barricadent fort bien »[2].

Ce premier combat se livre à la façon de ceux de l’Iliade. Deux canots algonquins s’approchent du rivage. Ils demandent si l’ennemi désire la bataille. Les Iroquois répondent qu’ils sont prêts, mais qu’il vaut mieux attendre le jour. Les Algonquins trouvent la réponse raisonnable. Les heures s’écoulent au milieu d’un duel de danses, de chansons guerrières, d’injures.

L’aube vient. Champlain et ses trois compagnons se cachent au fond des canots ; ils préparent leurs armes à feu. Les Algonquins abordent au rivage et se forment en pelotons. Les Iroquois sortent de leurs retranchements, ils n’ont aucune crainte, ils sont deux cents peut-être contre soixante. Ils approchent lentement, conduits par trois chefs à la tête ornée de plumes. Les Algonquins courent au-devant d’eux sur une distance de deux cents verges ; puis ils ouvrent leurs rangs et Champlain se met à la tête. À partir de ce moment, il les précède d’une vingtaine de pas. Les armées se rapprochent. Soudain les Iroquois

  1. Œuvres de Champlain, v. 2, p. 91.
  2. Idem, v. 2, p. 96.