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IROQUOISIE

étant découverts, ils n’attendent pas pour lordinaire le choc, mais ils sont plus tôt hors de la portée de vos armes, que vous n’êtes en disposition de les tirer »[1]. Mais la phrase qui, écrite en 1641, décrit le mieux la guérilla prochaine, est la suivante : « …Le commerce de ces Messieurs, la colonie des Français, et la religion qui commence à fleurir parmi les sauvages, sont à bas, si on ne dompte les Iroquois. Cinquante Iroquois sont capables de faire quitter le pays à deux cents Français… Si ces barbares s’acharnent à nos Français, jamais ils ne les laisseront dormir d’un bon sommeil : un Iroquois se tiendra deux ou trois jours sans manger, derrière une souche, à cinquante pas de votre maison, pour massacrer le premier qui tombera dans ses embûches ; s’il est découvert, les bois lui servent d’asile… Si on n’a ce peuple pour ami ou si on ne l’extermine, il faut abandonner à leur cruauté tant de bons néophytes, il faut perdre tant de belles espérances… »[2]. Ces phrases sont écrites quelques mois avant le déchaînement des guerres iroquoises proprement dites ; c’est plutôt de la prophétie que de l’observation. C’est un premier cri d’anxiété que la Nouvelle-France pousse. Après avoir parlé des tortures qui attendent les Hurons capturés, un missionnaire écrira aussi les paroles suivantes : « Voilà les funérailles et le sépulcre que nous attendons, si jamais nous venons à tomber entre les griffes de ces tigres, et dans la fureur de ces démons »[3]. En un mot, les pressentiments agitent la colonie. Contre une poussée iroquoise, quelle résistance opposeront en même temps la coalition laurentienne qui est pratiquement défaillante et la colonie française qui ne compte pas trois cents habitants ? Les temps autrefois redoutés par Champlain sont arrivés.

  1. RDJ, 1641-38.
  2. Idem, 1641-58.
  3. Idem, 1641-47.