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IROQUOISIE

suivis, ils avaient tué en route ceux qui ne marchaient pas assez vite. Et ils avaient retraité sous la pluie, à toute vitesse, pendant plusieurs jours.

Les Algonquins peuvent maintenant dormir tranquilles. Ils se sont vengés.

Toujours silencieuse, forte, n’éprouvant et ne manifestant aucune crainte au milieu de l’ennemi, la jeune Iroquoise a suivi l’armée algonquine : « … Elle avait la face modeste, mais l’œil si assuré, que je la prenais pour un homme » Ces Indiens ne torturent pas les prisonnières. Le lendemain, ils la donneront à M. Du Plessis-Bochart, pour remplacer l’un des trois Français tués en 1633. Alors seulement, elle pleure un peu. Puis les missionnaires lui annoncent qu’ils la conduiront en France où l’accompagneront quelques dames de la colonie. Madame de Combalet prendra charge de cette sauvagesse.

Quant à l’Iroquois, son sort est plus dur. Il n’a pas mis le pied sur la grève, que les femmes et les enfants le rouent de coups ; sans même se retourner, il passe en chantant ; un boiteux le flagelle d’une corde pliée en deux ; d’autres le brûlent avec des charbons ou lui enfoncent des tisons dans la bouche. Si le supplice lui laisse quelque répit, il danse. Une femme commence de lui couper un doigt avec ses dents, elle termine avec un couteau, puis elle le lui enfonce dans la bouche ; comme il le rejette, elle le met à rôtir et l’offre à ses enfants ; enfin, un soldat le leur enlève et le jette dans le fleuve. Deux jeunes Algonquines le mordent aux bras comme des louves. Le père Paul Le Jeune leur adresse des remontrances ; mais elles répliquent que les Iroquois infligent des tourments pires aux captifs algonquins. Le missionnaire obtient à la fin que l’on mette fin à ce supplice. Mais il n’aurait pas parlé avec la même véhémence aux Algonquins de l’île qui sont la superbe incarnée. Champlain, en effet, étant intervenu dans une occasion pareille, l’un d’eux avait saisi un enfant par le pied et lui avait brisé la tête sur un arbre, Le jeune Iroquois ne gagnera rien à ce délai. Expédié à Québec, il subira un supplice plus long et plus cruel que celui des