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CÉLINE.

Non, rien.

JULIE.
(À Louise.)

Non, rien.J’en dis autant. — Et toi ?

LOUISE.

Non, rien. J’en dis autant.Moi ? — je décline
Un tas de substantifs avec des adjectifs,
Et leurs comparatifs, et leurs superlatifs ;
J’y joins force pronoms, force adverbes et verbes…
Tout cela ne fait pas une phrase !… les herbes
Poussent dans mon cerveau… mais, de récolte ? Point.
Et j’ai beau me donner au front des coups de poing,
Il n’en sort pas la moindre agréable pensée.
Tiens ! Tiens ! (Elle se frappe la tête.)

CELINE.

C’était, Louise, une audace insensée,
Je le vois, — et d’abord je ne l’avais pas cru, —
Que de vouloir tirer des vers de notre crû !
On a dit bien souvent : « le cœur seul est poète »
Et pourtant, mon cœur parle et ma bouche est muette.