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molle, que n’ont pas quelquefois au même degré les hommes d’un vrai génie ; mais les tours variés, les coupes hardies et pittoresques, les grands secrets de l’harmonie et de la facture, sont interdits au versificateur. Il ne choque point, parce que ses défauts sont communs, ainsi que ses qualités ; c’est là le secret de ses petits triomphes de société. Il rappelle, en reflets effacés, dans ses hémistiches tout faits, dans ses images parasites, dans sa banale phraséologie, ce qu’on a justement admiré dans les chefs-d’œuvre de nos grands maîtres, et il y a des gens lettrés qui lui savent gré de cela. Le poète au contraire arrive avec ses beautés et ses fautes à lui, et tout le monde s’effarouche. Mais depuis quand la perfection est-elle dans les créations humaines ? Croit-on que Virgile même et Racine soient parfaits ?… Il y a quelquefois dans leurs ouvrages, défaut de force, défaut d’invention, défaut d’originalité, comme les défauts de Shakspeare et de Dante sont le mauvais goût, l’inconvenance et l’irrégularité. Chez les uns, les défauts sont négatifs, et pour ainsi dire d’omission ; chez les autres, ils sont positifs et en relief : toute la différence est là. Ces quatre hommes n’en sont pas moins quatre poètes divins. La critique devrait donc apprendre à se