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de la tragédie moderne, et qu’ils voient comment le goût le plus pur se prosterne devant le génie. C’est que les grands auteurs ont toujours été les plus grands critiques, quand ils ont voulu s’en mêler. Encore une fois, les maîtres de notre scène n’ont rien fait de complet par eux-mêmes dans les sujets modernes. Voltaire, en se tenant toujours dans le style pompeux, s’est privé de la ressource précieuse des contrastes de mœurs et de l’individualité des caractères. Nous n’avions que le Cid qui fût continuellement naturel et vrai ; aussi est-il emprunté à un théâtre étranger ; aussi Corneille l’appela-t-il tragi-comédie, tant ce grand homme sentait la nécessité du mélange des tons dans ce qui n’était point l’antique ; on sait comment il fut rejeté hors de cette voie nouvelle par les prétendus classiques du temps, mais on ne conçoit pas comment, dans les deux derniers siècles, aucun auteur n’a cherché à y rentrer. Nous persistons à dire que la seule manière d’y marcher à coup sûr, c’est de débuter par y suivre Shakspeare, de même que Racine, pour traiter les sujets antiques, s’est inspiré d’Euripide, et s’en est approché autant que son siècle le permettait. Du reste, il n’est pas question de vouloir détrôner nos grands poètes au profit d’un usurpateur, comme quelques gens