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grand poète qu’une idée toujours imparfaite et quelquefois très-fausse. Et puis, où sont donc les tragédies créées, parmi celles que depuis trente ans on nous a données pour nouvelles ? combien en est-il qui ont survécu à leur succès ! le compte ne serait pas dificile à faire. Avouons que sous d’autres titres, on nous joue perpétuellement la même chose ; nous voyons beaucoup de continuateurs… En vérité, jusqu’à ce qu’il se présente un génie inventeur, les traducteurs doivent avoir la préférence. Les continuateurs français nous donnent tout juste, en moindre qualité, ce que nous avions, depuis long-temps, en immortels chefs-d’œuvre. Au moins les traducteurs nous donneront-ils ce que nous n’avions pas encore. Ce n’est pas parce qu’un auteur prend un sujet nouveau qu’il fait une tragédie neuve ; si les caractères, les situations et le style n’en sont point innovés, s’il a mis à contribution vingt ouvrages nationaux pour composer le sien ; si la mémoire des spectateurs retrouve à tout moment Mithridate ou Alzire sous des habits et des noms supposés ; si, presqu’à chaque vers on se souvient du vers suivant, en croyant le deviner ; certes, une telle œuvre ne peut point raisonnablement passer pour une œuvre d’imagination. C’est que les fables tragiques sont extrêmement