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Lui-us. CDLXVIII. — i cr Février 1647. 609

& enfin, d'vn cofté, a noftre petiteffe, & de l'autre, à la grandeur de toutes les chofes créées, en remar- quant de quelle forte elles dépendent de Dieu, & en les confiderant d'vne façon qui ait du raport à fa 5 toute-puiffance, fans les enfermer en vne boule, comme font ceux qui veulent que le monde foit finy : la méditation de toutes ces chofes remplit vn homme qui les entend bien d'vne ioye fi extrême, que, tant s'en faut qu'il foit iniurieux & ingrat enuers Dieu

10 iufqu'à fouhaiter de tenir fa place, il penfe a déia auoir affez vécu de ce que Dieu luy a fait | la grâce de paruenir à de telles connoilTances ; & fe ioignant entièrement à luy de volonté, il l'aime fi parfaitement, qu'il ne deûre plus rien au monde, finon que la vo-

1 5 lonté de Dieu foit faite. Ce qui eft caufe qu'il ne craint plus ny la mort, ny les douleurs, ny les difgraces, pource qu'il fçait que rien ne luy peut arriuer, que ce que Dieu aura décrété ; & il aime tellement ce diuin décret, il l'eftime li iufle & fi neceflaire, il fçait

20 qu'il en doit fi entièrement dépendre, que, mefme lors qu'il en attend la mort ou quelqu'autre mal, fi par impoiîible il pouuoit le changer, il n'en auroit pas la volonté. Mais, s'il ne refufe point les maux ou les afflictions, pource qu'elles luy viennent de la proui-

j5 dence diuine, il refufe encore moins tous les biens ou plaifirs licites dont il peut iouir en cette vie, pource qu'ils en viennent aulîï ; & les receuant auec ioye, fans auoir aucune crainte des maux, (on amour le rend parfaitement heureux.

3o II eft vray qu'il faut que lame fe détache fort du

a. « qu'au contraire il pense. . : » (Inst.)

Correspondance. IV. 77

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