Page:Descartes - Œuvres, éd. Adam et Tannery, IV.djvu/535

Cette page n’a pas encore été corrigée

CDL. — 10 Octobre 1646. $21

prendre. De me/me, lorfque les violences viennent prom- tement & tout a la fois, elles fafchent moins quelles nef- tonnent, & font aufji plus fuportables au peuple, qu'vne longue fuite de miferes que les guerres ciuiles apportent. 5 // me femble qu'il y aioute encore, ou bien ïenfeigne, par l'exemple du neueu du pape Alexandre, qu'il propofe comme vn politique parfait*, que le Prince doit employer a ces grandes cruautés quelque Minijlre qu'il puiffe par dpres facrifier a la haine du peuple; & quoy qu'il paroiffe

10 iniufle au Prince de faire périr vn homme qui luy auroit obéi, ie trouue que des perfonnes fi barbares & defnatu- re's, qui fe veulent employer aferuir de bourreau a tout vn peuple, pour quelque confideration que ce foit, ne mé- ritent point de meilleur traitement; &pour moy, ieprefc-

1 5 rerois la condition du plus pauure paifan d'Hollande, a

celle du Minijlre qui voudroit obéir a pareils ordres,

ou a celle du Prince qui feroit contraint de les donner.

Lorfque le mefme auteur parle des allie^, il les fup-

pofe, pareillement, aufji mechans qu'ils peuuent ejlre, &

20 les affaires en telle extrémité', qu'il faut perdre toute vne republique, ou rompre fa parole a ceux qui ne la gardent qu' aufji long tems qu'elle leur ejl vtile.

Mais, s'il a tort de faire des maximes générales de ce qui ne fe doit pratiquer qu'en fort peu d'occafions, il pefche

2 5 en cela ef gaiement auec prefque tous les S ts Pères & les anciens philofophes, qui en font de mefme; & ie crois que cela vient du plaifir qu ils prennent a dire des paradoxes, qu'ils peuuent après expliquer a leurs efcoliers. Lorfque cet homme icy dit qu'on fe ruine, fi on veut touiours eflre

3o homme de bien *, ie croy qu'il n'entend point que, pour

a. Voir ci-avant p. 486, 1. 28, et p. 490, 1. i5.

Correspondance. IV. 66

�� �