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i, i 9 . CDI. — I er Septembre 164$. 283

tout a fait le fens, mais altèrent feulement les hu- meurs, & font qu'on fe trouue extraordinairement enclin a la trifteffe, a la cholere, ou a quelque autre paffion, elles donnent fans doute de la peine, mais 5 elles peuuent élire furmontées, & mefme donnent ma- tière a l'ame d'vne fatisfaction d'autant plus grande, qu'elles ont efté plus difficiles a vaincre. Et ie croy auffy le femblable de tous les empefchemens de dehors, comme de l'efclat d'vne grande naiffance,

10 des caioleries de la cour, des aduerfitez de la fortune, & auffy de fes grandes profperitez, lefquelles ordi- nairement empefchent plus qu'on ne puiffe iouer le rolle de Philofophe, que ne font fes difgraces. Car lorfqu'on a toutes chofes a fouhait, on s'oublie de

i5 penfer a foy, & quand, par après, la fortune change, on fe trouue d'autant plus furpris, qu'on s'eftoit plus fié en elle. Enfin on peut dire généralement qu'il n'y a aucune chofe qui nous puilfe entièrement ofter le moyen de nous rendre hureux, pourueu qu'elle ne

20 trouble point noftre raifon ; & que ce ne font pas toufiours celles qui paroiiTent les plus fafcheufes, qui nuifent le plus.

Mais affin de fçauoir exactement combien chafque chofe peut contribuer a noftre contentement, il faut

2 5 confiderer quelles font les caufes qui le produifent, & c'eft auffy l'vne des principales connoiffances qui peuuent feruir a faciliter l'vfage de la vertu; car toutes les actions de noftre ame qui nous acquerent quelque perfection, font vertueufes, & tout noftre

1 après mais] qui ajoute. — peuuent] pourtant ajouté. — 3 second a] ou à. — 5 après mefme elles. — 7 Et omis.

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