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276 Correspondance. i, 16.

eftre receuës pour vrayes & accordées entre elles, pouruu qu'on les interprète fauorablement.

Car Ariftote ayant confideré le fouuerain bien de toute la nature humaine en gênerai, c'eft a dire celuy que peut auoir le plus accompli de tous les hommes, 5 il a eu raifon de le compofer de toutes les perfections dont la nature humaine eft capable ; mais cela ne fert point a noftre vfage a .

Zenon, au contraire, a confideré celuy que chafque homme en fon particulier peut pofleder; c'eft pour- 10 quoy il a eu aufly très bonne raifon de dire qu'il ne confifte qu'en la vertu, pource qu'il n'y a qu'elle feule, entre les biens que nous pouuons auoir, qui dépende entièrement de noftre libre arbitre. Mais il a repre- fenté cete vertu û feuere & fi ennemie de la volupté, >5 en faifant tous les vices égaux, qu'il n'y a eu, ce me femble, que des melancholiques, ou des efprits entiè- rement détachez du cors, qui ayent pu eftre de fes fedateurs.

Enfin Epicure n'a pas eu tort, confiderant en quoy 20 confifte la béatitude, & quel eft le motif, ou la fin a laquelle tendent nos actions, de dire que c'eft la vo- lupté en gênerai, c'eft a dire le contentement de l'ef- prit ; car, encore que la feule connoiflance de noftre deuoir nous pourroit obliger a faire de bonnes ac- 25 tions, cela ne nous feroit toutefois iouir d'aucune béatitude, s'il ne nous en reuenoit aucun plaifir. Mais pource qu'on attribue fouuent le nom de volupté a

6 eu omis. — 9-10 chafque homme] chacun. — 28 pource] parce, a. MS. : osage.

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