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CCCLXV1I. — 9 Février 164$. 167

partie de la matière qui y eftoit alors, & mefme qu'ils n'ayent plus la mefme figure ; en forte qu'ils ne font eadem numéro, qu'a caufe qu'ils font informez de la mefme ame. Pour moy, qui ay examiné la circulation

5 du fang, & qui crois que la nutrition ne fe fait que par vne continuelle expulfion des parties de noftre corps, qui font chaffées de leur place par d'autres qui y entrent, ie ne penfe pas qu'il y ait aucune particule de nos membres, qui demeure la mefme numéro vn

10 feul moment, encore que noftre corps, en tant que corps humain, demeure toufiours le meimc numéro, pendant qu'il eft vny auec la mefme ame. Et mefme, en ce fens là, il eft indiuifible : car, fi on coupe vn bras ou vne iambe a vn homme, nous penfons bien

i5 que fon corps eft diuifé, en prenant le nom de corps en la i rc fignification, mais non pas en le prenant en la 2 de ; et nous ne penfons pas que celuy qui a vn bras ou vne iambe couppée, foit moins homme qu'vn autre. Enfin, quelque matière que ce foit, & de quelque

»o quantité ou figure qu'elle puiiïe eftre,pourueu qu'elle foit vnie auec la mefme ame raifonnable,nous la pre- nons toufiours pour le corps du mefme homme, & pour le corps tout entier, fi elle n'a pas befoin d'eftre accompagnée d'autre matière pour demeurer iointe a

a 5 cette ame.

De plus, ie confidere que, lors que nous mangeons du pain & beuuons du vin, les petites parties de ce pain & de ce vin, fe diflbluant en noftre eftomach, coulent incontinent de là dans nos veines, & par cela

îo feul qu'elles fe méfient auec le fang, elles fe tranf- fubftantient naturellement, & deuiennent parties de

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