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Ensuite Descartes écrit as, où nous écrivons â, dans les mots comme haste et haster, tasche et tascher, blasme, bastons, tastons, etc. Il y a même des cas où nous avons supprimé tout accent sur l’a, bien que cette voyelle se retrouve chez lui allongée d’une s, comme dans voyasge, chasque, chascun, etc. Il écrit aage pour âge.

Il écrit es, où nous mettons aujourd’hui ê, dans les mots prest, arest, mesme, honneste, estre, empescher, mesler, etc. (et meslange, où nous écrivons é).

Pour la voyelle i, la question est complexe, cette lettre se retrouvant dans les diphtongues ai et oi. Descartes écrit maistre et s’il vous plaist ; il écrit paroistre et il paroist, connoistre, etc. Il écrivait d’abord viste et vistesse (f. 48 verso, l. 31 et 41, novembre 1629) : on trouve ensuite vite et vitesse ; cependant viste reparaît encore à plusieurs reprises (f. 24 verso, 4 mars 1641). On trouve agist quatre fois dans un même texte du 5 octobre 1637, et même il reduist, ce qui est sans doute une faute, Descartes écrivant ailleurs il deduit, etc.[1]

  1. Lire sur cette question en particulier Lannel (voir plus haut, p. lxxxvi, note), Lettre IIII à Mons. de Saint-Chamas, p. 41 : « Puis que les lettres de l’Alfabet ne seruent que pour construire les syllabes, et les syllabes pour composer les mots, par le moyen desquels nous communiquons nos pensees, i’estime que nous deuons retrancher les lettres superfluës, lesquelles ne peuuent estre prononcees auec la force qu’elles ont, sans vn insupportable changement de la prononciation des mots ausquels elles sont contenuës… Si donc nous écriuons, tesmoigner, establir, esuenter, et les autres semblables, auec vne s à chaque mot, et que nous la prononcions, il est certain qu’on croira que c’est pour contrefaire les paysans de Gascogne. » Plus loin, p. 51-52, il note « la difference de quelques mots, qui semblera, ie m’assure, digne d’estre remarquee. Il fit est vn temps passé, comme : le fû Roi fit vne infinité de bonnes actions. Il fist est vn optatif, s’il m’est permis d’vser de ce mauuais mot, comme : Plust à Dieu que le Roy fist en sorte que la vertu fust mieux recompensee qu’elle n’est. Il pût est aussi vn temps passé, comme : le fû Roy pût contraindre les Espagnols à luy rendre son domaine. Il pust est vn optatif, comme : Plust à Dieu que le Roy pust empécher les pechez qui se commettent. » Ib., p. 53-54 : « On m’obiectera peut-estre que la consonne s ne se prononce point aux optatifs qui l’ont, comme, fist, eust, pust, et les autres, et que, par consequent elle est inutille, et qu’il n’y doit point