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Quel temps ! De tous ces jours d’école et de soleil
Qui hâtaient la pensée à votre front vermeil,
De ces flots de peinture et de grâce inspirée,
L’âme sort-elle heureuse, ô ma douce lettrée ?
Dites, si quelque femme avec votre candeur
En passant par la gloire est allée au bonheur ?…

Oh ! que vous me manquiez, jeune âme de mon âme !
Quel effroi de sentir s’éloigner une flamme
Que j’avais mise au monde, et qui venait de moi,
Et qui s’en allait seule : Ondine ! quel effroi !

Oui, proclamé vainqueur parmi les jeunes filles,
Quand votre nom montait dans toutes les familles,
Vos lauriers m’alarmaient à l’ardeur des flambeaux :
Ils cachaient vos cheveux que j’avais faits si beaux !
Non, voile plus divin, non, plus riche parure
N’a jamais d’un enfant ombragé la figure.
Sur ce flot ruisselant qui vous gardait du jour
Le poids d’une couronne oppressait mon amour.
Vos maîtres étaient fiers et moi j’étais tremblante ;
J’avais peur d’attiser l’auréole brûlante,
Et, troublée aux parfums de si précoces fleurs,
Vois-tu, j’en ai payé l’éclat par bien des pleurs.
Comprends tout… J’avais vu tant de fleurs consumées !