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NOTICE


C’est un de nos vœux qui s’accomplit aujourd’hui : nous avions désiré toujours qu’un volume contînt et rassemblât la fleur, le parfum de cette poésie si passionnée, si tendre, et véritablement unique en notre temps. Madame Valmore s’est fait une place à part entre tous nos poètes lyriques, et sans y songer. Si quelqu’un a été soi dès le début, c’est bien elle : elle a chanté comme l’oiseau chante, comme la tourterelle gémit, sans autre science que l’émotion du cœur, sans autre moyen que la note naturelle. De là, dans les premiers chants surtout, qui lui sont échappés avant aucune lecture, quelque chose de particulier et d’imprévu, d’une simplicité un peu étrange, élégamment naïve, d’une passion ardente et ingénue, et quelques-uns de ces accents inimitables qui vivent et qui s’attachent pour toujours, dans les mémoires aimantes, à l’expression de certains sentiments, de certaines douleurs.

Marceline Desbordes est née à Douai vers 1787, deux ans avant cette révolution qui, par contre-coup, allait ruiner son humble famille. Son père, peintre et doreur en blason et en ornements d’église, fut doublement atteint, comme on le peut croire, par la double suppression qui décolorait l’autel et le trône. La jeune Marceline reçut de ces circonstances premières de naissance et d’enfance toutes sortes d’empreintes et de signes qui décidèrent de sa sensibilité et donnèrent la nuance profonde à son talent. Au-dessus de la porte étroite de la chère maison que ses poésies nous ont tant de fois rouverte, se voyait une petite madone dans une