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En cédant à tes vœux, j’ai trahi mon devoir ;
Mais, ne m’en punis pas. Elle est loin, ta chaumière !
Pour nous parler d’amour, tu demandais le soir…
Eh bien ! pour te sauver, prends la nuit tout entière ;
Mais ne me parle plus de ce cruel amour ;
Je vais l’offrir à Dieu, dans ma tristesse extrême :
C’est en priant pour ce que j’aime
Que j’attendrai le jour.

Sur nos champs inondés tourne un moment la vue :
Réponds ; malgré mes pleurs, veux-tu partir encor ?
Méchant, ne souris plus de me voir trop émue ;
Peut-on ne pas trembler en quittant son trésor ?
Je vais me réunir à ma sœur endormie :
Adieu ! laisse gronder et gémir l’aquilon ;
Quand il aura cessé d’attrister le vallon,
Tu pourras t’éloigner du toit de ton amie.
Mais quel nouveau malheur ! qu’allons-nous devenir ?
N’entends-tu pas la voix de mon vieux père ?
Ne vois tu pas une faible lumière ?…
De ce côté, Dieu ! s’il allait venir !
Pour une faute, Olivier, que d’alarmes !
Laisse-moi seule au moins supporter son courroux ;
Puis tu viendras embrasser ses genoux
Quand je l’aurai désarmé par mes larmes.