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« Il semble qu’il demande et choisit sa maîtresse ;
« Comme il me caressait, je vois qu’il te caresse.
« Les nœuds pour l’arrêter sont déjà superflus ;
« Tu lui parles, Philis, il ne m’écoute plus ! »

Son père, en l’embrassant, nous permit cet échange.
Il fallut m’en aller !… Je courus sous la grange,
À mes tendres parens raconter mon bonheur ;
Je montrai la guirlande encore sur mon cœur :
Je parlais de Philis, et j’embrassais ma mère !
Je brûlais que le jour nous rendît sa lumière !
En respirant les fleurs enfin je m’endormis,
Et mon rêve disait : Philis ! Philis ! Philis !
Ce nom charme en tous lieux mon oreille ravie ;
Il a doublé mon âme et commencé ma vie ;
Mes lèvres en dormant le savent prononcer,
Et, dans l’ombre, ma main essaie à le tracer ;
C’est pour l’unir au mien que j’apprends à l’écrire
Éveille-toi, Philis ! je n’ai plus rien à dire.
Tu peux ouvrir les yeux, le calme est de retour ;
Le soleil épuré recommence un beau jour ;
Avant de les quitter, il sèche nos campagnes,
Et de ses derniers feux redore les montagnes.

Ô berger ! si le ciel ici t’a fait venir
C’est que le ciel nous aime, et qu’il va nous bénir !