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Oui, berger, c’est Philis qui m’a dit tout à l’heure :
« Olivier, le ciel gronde ; on s’enferme au hameau.
« Nous sommes à l’abri ; mais au pied du coteau
« Je vois un vieux berger… Qu’il vienne en ma demeure.
« Regarde sur son front voler ses cheveux blancs !
« Comme il lève les yeux vers le ciel en colère !
« Il se met à genoux… C’est qu’il a des enfans,
« Et qu’il demande au ciel de leur garder un père ! »
Et Philis de mes mains a retiré sa main ;
Et jusqu’au fond du cœur j’ai cru sentir ses larmes !
Et j’ai couru vers toi… Mais, au bout du chemin,
Tu verras s’il est doux de calmer ses alarmes !

Berger, voilà Philis ! — Elle nous tend les bras ;
Vois comme son sourire est mêlé de tristesse !
Elle songe à sa mère, et pleure de tendresse :
Sa mère lui sourit… mais ne lui répond pas !
Entrons — Le vieux berger rêve à ton doux langage,
Philis ! il te regarde, il est moins abattu.
On est calme avec toi, même au bruit de l’orage ;
Ô Philis ! on est bien auprès de la vertu !
Tandis que ses moutons sous la feuillée obscure
Arrachent à la terre une humide verdure,
Je lui raconterai, pour charmer ta frayeur,
Le plus beau de mes jours, le jour où je t’ai vue !