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Insensible !… Ah ! du moins, apprends-moi, je te prie,
Quand l’heure d’Amour sonnera ;
Au doux bruit de ta sonnerie
Quand sa fierté s’endormira ;
Et quand viendra l’heure chérie,
À qui Lyris la donnera !…
Le matin, dès qu’elle s’éveille,
Celle qui m’asservit, se gouverne par toi.
Est-il tard ? dit Lyris, dont l’âme encor sommeille ;
Et ta réponse est pour elle une loi !
Ah ! loin de t’imiter, si j’étais auprès d’elle,
Pour étouffer ton timbre importun aux Amours,
À force de baisers j’étourdirais ma belle ;
Et la nuit durerait toujours !…
Je rêve. Oh ! quelle est ma faiblesse !
Mais vois, en comparant ton sort avec le mien,
Si l’enfant qui brûle et qui blesse,
M’en fit un différent du tien !
Une heure pour toi n’est qu’une heure ;
Un moment n’est rien qu’un moment ;
Mais une heure, un moment, dans sa triste demeure,
Est un siècle pour un amant !
Si Lyris était moins farouche,
Les ans ne me seraient qu’un jour ;
Ils s’écouleraient sur sa bouche,
Et je rirais avec l’Amour !