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Elle offre à Dieu cet amour qui l’opprime ;
Puisqu’il fait tant de mal, il faut qu’il soit un crime !
Mais, ne vivant que par le souvenir,
Le passé la poursuit jusque dans l’avenir.
Plus de sommeil ; Pauline en vain l’appelle ;
Pour le malheur il est sourd et rebelle.
Plus de vertu, plus d’amis, plus d’amant ;
Tout est perdu par l’erreur d’un moment :
C’est la fleur du vallon sur sa tige abattue
Par le frimas qui l’effeuille et la tue !
C’était l’hiver : la saison de l’Amour
Semblait avoir disparu sans retour.
Assise, un soir, au bord de sa chaumière,
Pleurant sa honte, et fuyant la lumière,
Un bruit soudain fait tressaillir son cœur ;
Un char léger ramène son vainqueur…
Il a parlé… c’est la voix qu’elle adore ;
C’est lui ! dit-elle, il vient ! il m’aime encore ;
Mais un regard fait tout évanouir ;
L’espoir s’enfuit… Pauline va mourir !
Oui, c’est l’ingrat qu’elle attend et qu’elle aime,
Mais peignez-vous son désespoir extrême !
Il n’est pas seul ! il entraîne, à son tour,
L’objet nouveau de son volage amour !
À cette vue, immobile et glacée,
Le cœur saisi d’une affreuse pensée,