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MÉLANGES.


CONTE
IMITÉ DE L’ARABE.


C’était jadis. Pour un peu d’or,
Un fou quitta ses amours, sa patrie.
(De nos jours, cette soif ne paraît point tarie ;
J’en connais qu’elle brûle encor.)
Courageux, il s’embarque ; et, surpris par l’orage,
Demi-mort de frayeur, il échappe au naufrage ;
La fatigue d’abord lui donna le sommeil ;
Puis enfin l’appétit provoqua son réveil ;
Au rivage, où jamais n’aborda l’Espérance,
Il cherche, mais en vain, quelque fruit savoureux.
Du sable, un rocher nu, s’offrent seuls à ses yeux ;
Sur la vague en fureur il voit fuir l’existence ;
L’âme en deuil, le cœur froid, le corps appesanti,
L’œil fixé sur les flots qui mugissent encore,
Sentant croître et crier la faim qui le dévore,
Dans un morne silence il reste anéanti.
La mer, qui par degrés se calme et se retire,