Page:Desbordes-Valmore - Poésies, 1820.pdf/112

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
(102)

Souvent dans un sourire on devine des pleurs.
Toi qui chantes toujours, tu ne peux le comprendre.
Ma voix n’a plus d’essor, et j’ai le temps d’apprendre
Qu’un chagrin se révèle en soupirant tout bas.
Si je pouvais chanter, je ne l’entendrais pas !

DORIS.

S’il parle, il dit au bois que nous sommes jolies ;
Que s’il a ralenti son cours précipité,
C’est qu’il croit voir en toi les Grâces recueillies ;
Et qu’il prend du plaisir à doubler ma beauté.
Voilà (je te dis tout}, ce qu’un berger m’assure ;
Sa parole est sincère, et, pour preuve, il le jure.

HÉLÈNE.

Il le jure !… ah ! prends garde ! et si tu veux bien voir,
Doris ! ne choisis pas un flatteur pour miroir.

DORIS.

Si tu savais son nom, tu serais bien honteuse !

HÉLÈNE.

Bergère, il est berger ; sa parole est douteuse.

DORIS.

Il m’a dit qu’au rivage il tracerait, un jour,
Pour l’orgueil du ruisseau, mon chiffre et son amour.

HÉLÈNE.

L’Amour aime à tracer les sermens sur le sable ;
Un coup de vent répond de sa fidélité ;
D’une plume légère il compose une fable ;
Ses flèches dans nos cœurs gravent la vérité.,