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SARAH.

que je me crus au moment de suivre votre mère ; mais vous étiez là, petite maîtresse ; vous ne parliez pas encore ; mais vous pleuriez, vous cherchiez des yeux cette mère que vous ne deviez plus revoir ; et l’idée de vous quitter aussi me donna tant d’effroi, que je vous emportai dans mes bras loin de cette cabane si triste alors. En parcourant le bois ; dont je n’osais pas encore sortir, où j’avançais toujours avec crainte, et toujours sans vous, je m’entendis un jour appeler par mon nom : c’était la première fois, depuis deux ans, qu’une voix d’homme frappait mon oreille, et je m’arrêtai saisi de frayeur. Un vieux nègre marron sortit des halliers où je m’étais engagé, et je le reconnus pour l’esclave d’un voisin de mon vieux maître : comme il était presqu’aussi tremblant que moi-même, se croyant poursuivi ; je me rassurai ; et lui dis de ne rien craindre