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HUIT FEMMES.

» Que ne donnerais-je pas, moi, pour aller droit à l’arc-en-ciel savoir comment des gouttes d’eau forment ces trois rubans de teintes harmonieuses !

» Quelle joie de flotter au-dessus de terre comme une brise vivante, de traverser les arbres en fleurs, d’y monter légèrement, et du haut de leur cime balancée par le vent, de regarder au-dessous les champs de blé mûr et le lin soyeux !

» Que ne m’avez-vous donné les ailes d’un oiseau, ma mère, puisque je n’ai ni la maison, ni le rang, ni le sol de mes pères !

» La vie d’un oiseau doit être une fête dans les bois pleins de feuilles qui parlent. Il est là comme sous le toit vert d’un palais. Il y vole de chambre en chambre ; elles sont claires et gaies, ouvertes au soleil, aux étoiles, dont les rayons blancs jouent au milieu.

» Je vous aurais bénie, ma mère ! j’aurais été dire à Dieu : Je bénis ma mère, car elle m’a donné des aîles d’oiseau !

» Il peut laisser son nid dans le chêne de la forêt ; les oiseaux n’ont pas besoin de demeure ; jeunes et vieux s’envolent errer ensemble ; ils traversent en liberté leur monde bleu !

» Écoutez comme au creux de cette salle ombreuse ils s’appellent l’un l’autre amicalement ! Venez, venez ! semblent-ils dire.

» Vous n’avez donc jamais entendu d’oiseaux s’appeler entre eux, ma mère !

» Venez, venez ! la vie est belle là où les feuilles dansent dans l’haleine de l’été !

» Nous venons, nous venons ! leur répondent les