Page:Desbordes-Valmore - Huit femmes, 1845.pdf/59

Cette page a été validée par deux contributeurs.
57
HUIT FEMMES.

un ciel de brouillards, par les rêves indécis dont elle noie le cœur et l’imagination. Il se blessait lui-même de ses accens trop passionnés, comme les sons gémissans de l’harmonica fêlent quelquefois le cristal qui les produit. Le chanteur frémissait de sa voix qui, ne trouvant pas assez d’air pour s’étendre et se dissoudre au loin dans une atmosphère sans écho, répercutait sur lui-même sa puissance accablante. S’il n’eût cessé tout à coup, il fût tombé mourant, comme le rossignol épuisé d’harmonie, aux pieds de Fanelly tourmentée ; de Fanelly en deuil et orpheline, qui, cherchant autour d’elle et ne trouvant qu’elle sous les yeux baignés de larmes du jeune italien, se sentit et s’avoua l’objet inspirateur de ses souffrances mélodieuses.

Elle fut perdue. Elle but en silence ce