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Laisse-moi respirer, désespoir d’une mère !
Dieu l’ordonne… Dieu parle à mon cœur éperdu.
« Suis mon arrêt, dit-il ! reste encor sur la terre. »
S’il ne venait de Dieu, serait-il entendu ?….
Mais, vers l’éternité quand mon ame brûlante
S’envolera, baignée encor de pleurs,
Délivrée à jamais d’une chaîne accablante,
Je reverrai mon fils !… Quel prix de mes douleurs !
Éternité ! consolante, et terrible !
Pour le méchant, c’est l’enfer, c’est son cœur !
Mais pour l’être innocent ; malheureux et sensible,
C’est le repos ! c’est le bonheur !…
Ô Dieu ! quand de mon fils sonna l’heure suprême,
Un doute affreux ne m’a pas fait frémir.
Non, cet être charmant, au sein de la mort même,
N’a fait que s’endormir !
Ô tendresse, ô douleur !… ô sublime mélange !…
Ses yeux remplis d’amour se ferment sur mes yeux…
Je m’attache à son corps… Ce n’était plus qu’un ange
Qui s’envolait aux cieux !