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Comme un rêve mélancolique,
Le souvenir de mes amours
Trouble mes nuits, voile mes jours.
Il est éteint ce feu, ce charme unique !
Éteint par toi, cruel !… En vain, à mes genoux,
Tu promets d’enchaîner un amant plus aimable ;
Ce cœur blessé, dont l’amour est jaloux,
Donne encore un regret, un soupir au coupable.
Qu’il m’était cher ! que je l’aimais !
Que par un doux empire il m’avait asservie !
Ah ! je devais l’aimer toute ma vie,
Ou ne le voir jamais !
Que méchamment il m’a trompée !
Se peut-il que son ame en fût préoccupée
Quand je donnais à son bonheur
Tous les battemens de mon cœur !
Dieu ! comment se peut-il qu’une bouche si tendre
Par un charme imposteur égare la vertu ?
Si ce n’est dans l’amour, où pouvait-il le prendre,
Quand il disait je t’aime, m’aimes-tu ?…
Ô fatale Inconstance ! ô tourment de mon ame !
Qu’as-tu fait de la sienne, et qu’as-tu fait de moi ?
Non, ce n’est pas l’Amour !… ce n’est pas lui ! c’est toi
Qui de nos jours heureux a désuni la flamme.
Je ne pouvais le croire : un triste étonnement
Au cœur le plus sensible ôtait le sentiment.