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Oui ! c’est l’ingrat qu’elle attend et qu’elle aime ;
Mais peignez-vous son désespoir extrême !
Il n’est pas seul ! il entraîne, à son tour,
L’objet nouveau de son volage amour !
À cette vue, immobile et glacée,
Le cœur saisi d’une affreuse pensée,
Pauline au ciel jette un cri douloureux,
Tombe à genoux, et détourne les yeux…
Le froid du soir circule dans ses veines,
Son ame s’engourdit dans l’oubli de ses peines ;
Et, prenant par degrés le sommeil pour la mort,
En embrassant la terre, elle pleure… et s’endort.
Le ciel touché l’enveloppe d’un songe.
Lise ! écoutez ce bienfaisant mensonge :
Elle croit voir un ange protecteur
La ranimer doucement sur son cœur ;
Presser sa main, l’observer en silence,
Les yeux mouillés des pleurs de l’indulgence.
« Dieu vous a-t-il envoyé près de moi,
» Lui dit Pauline, et suivez-vous sa loi ?
» Si la vertu vient essuyer mes larmes,
» Parlez ! sa voix aura pour moi des charmes.
» Voyez mon sort ! voyez mon repentir !… »
Pour sa réponse elle entend un soupir ;
Son œil mourant s’entr’ouvre à la lumière…
L’ange est Edmond à genoux sur la pierre,