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LA NUIT D’HIVER.


Qui m’appelle à cette heure, et par le temps qu’il fait ?
C’est une douce voix, c’est la voix d’une fille…
Ah ! je te reconnais ! c’est toi, Muse gentille,
Ton souvenir est un bienfait.
Inespéré retour ! aimable fantaisie !
Après un an d’exil qui t’amène vers moi ?
Je ne t’attendais plus, aimable Poésie,
Je ne t’attendais plus, mais je rêvais à toi.
Loin du réduit obscur où tu viens de descendre,
L’amitié, le bonheur, la gaîté, tout a fui.
Ô ma Muse ! est-ce toi que j’y devais attendre ?
Il est fait pour les pleurs, et voilé par l’ennui.
Ce triste balancier, dans son bruit monotone,
Marque d’un temps perdu l’inutile lenteur ;
Et j’ai cru vivre un siècle, hélas ! quand l’heure sonne
Vuide d’espoir et de bonheur…
L’hiver est tout entier dans ma sombre retraite :
Quel temps as-tu daigné choisir !
Que doucement par toi j’en suis distraite !
Oh ! quand il nous surprend, qu’il est beau le plaisir !