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Missives

Or premier que leur voir esprouver ces divers chãgemens, je desire infiniment qu’elles vous soient agreables (ma Mere) & vous supplie humblement les aymer plus que leur beauté ne merite : afin qu’elles ne demeurent du tout manques d’apuy. Vous en trouverez peu qui s'adressent à vous : en cecy paroist mon bonheur, qui ne permet point que je vous esloigne de presence & moins de ma pensce, qui sera tousjours proche, prompte, humble, & devote pourvous servir. Ma Mere je suppliray la puissance divine qu’elle vous face vivre plus que moy, afin que vous resembliez mieux au ciel, qui estant creé le premier, doit finir le dernier.

2.


LEs anciens auteurs de ces deitez que l'on dit remplir l'Olimpe, estoiẽt certains personages de grande autorité, qui regardans les passions humaines estre immortelles entre les mortels, ont couvert d'un gracieux voile telles affections, leur donnant le tiltre de la divinité. Aussi vous (Monsieur) m'estimant oultre mon merite, vous honorez par la faveur de vos graces le peu de valeur qui est en moy ; celant mes imperfections dans l'agreable nuage de vos beaux escris. Mais tout ainsi que Homere & Virgile rendent leurs noms plus remerquables que celuy d'Achille & d'Enee, ainsi vos vertus infinies bien qu'elles soient tres liberales,reservent plus d'honneur pour vous que de loüanges pour moy ; qui pourtant les ayant creceües, vous en remercie humblement.