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235A la teste d’Ossa qui blessé se divise
Du sommet de l’Olympe, & l’onde plus rassise
Coula dedans ses bords, les fleuves à la mer
Les champs aux laboureurs se donnent pour semer.
La Trinacrie ainsi se cognoissant la moindre,
240Ne sçauroit repousser la main qui la veut poindre,
Perdant ses liens durs souz un plus grand pouvoir,
En un gouffre estendu le vain-cueur se fait voir.
Les Astres ont palli d’une douteuse crainte,
Les cieux en ont tremblé, l’ource a esté contrainte
245De se baigner en mer, faulseant ainsi la foy,
Bootes est tombé, Orion plein d’effroy,
Atlas est tout blesmi : les poles se brunissent,
Le monde est estonné, les chevaux qui hannissent
D’une halaine mortelle ont tout decoloré,
250Et le flambeau du jour en est deshonoré.
Eux qui ont à desdain la plaisante lumiere,
A peine estant venus retournent en arriere.
Mais ayant sur leur dos senti le pesant coup,
Le dard volant en l’air ils passent de beaucoup,
255Et le fleuve, & le vent, voire le penser mesmes.
Les Nymphes s’escartans deviennent toutes blesmes,
Voiant l’horrible char & l’escume de sang :
Fuiant avec la peur elles faulsent le rang.
Proserpine est ravie, & paroist demi-morte
260Au sein du ravisseur qui resjouy l’emporte.
Elle veut efforcer ses delicates mains,
Afin de s’affranchir, mais ses effors sont vains,
Rappellant ses esprits d’une voix lamentable
Ell’ implore ses sœurs : la vierge redoutable