Quelle source de feu, qui n’est jamais estainte ;
Quelle fureur de vent, qui n’est jamais contrainte,
Au logis de Vulcan le vent superbe, ireux,
Et de la liberté se trouvant desireux
Des rochers caverneux va recherchant les centres,
Et l’air empuanti dans le profond des antres.
Parfois la mer glicee aux entrailles du mont
Bouillonne par le souffre, & le souffre se fond
Au fond de sa moiteur : là Ceres immortelle
Pensant avoir trouvé la contree fidelle
Pour bien garder sa Fille, ell’luy laisse en depos.
Puis aiant son esprit un peu plus à repos,
Sans crainte elle va voir aux terres de Phrygie.
Cybelle porte-tours son ancienne amie,
Guidant au chariot ses Dragons escaillez,
Qui de mille couleurs resemblent esmaillez,
Sus leurs dos verdoians paroissent des estoilles
De fin or reluysans : leurs crestes sont des voiles,
Qui ombragent le frond : leurs membres sinueux
Sont tousjours ondoians en replus tortueux
Avec un doux venin rendant leurs frains humides.
Ils passent les Zephirs, fendant les airs liquides :
Tantost ils vollent hault, puis les pleines rasant
Ils vont de toutes pars les champs fertilisant.
Les blez sont jaunissans aux endroits où ils passent :
Leurs pieds tracent des pas que les herbes destracent
Verdissant le chemin. O de combien de lieux
La Mere desolee a fait voler ses yeux
Au lieu de son plaisir ! desja la Trinacrie
Par un fuitif regard luy semble estre amoindrie.
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