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autorité ni responsabilité ne pouvait conduire les armées à la victoire.

« Théoriquement, il devenait de plus en plus clair, — dit un des commissaires les plus en vue, l’ancien membre du Comité Exécutif du Soviet, Stankevitch — qu’il fallait soit abolir l’armée, soit abolir les comités. Mais pratiquement on ne pouvait faire ni l’un ni l’autre. Les comités étaient l’expression éclatante de la maladie sociologique inguérissable de l’armée ; l’indice de sa mort certaine, sa paralysie. Toutefois, la tâche du Ministère de la Guerre était-elle d’accélérer la mort par une intervention chirurgicale énergique, mais sans espoir ?… »

Durant la première période de la révolution, l’armée russe, autrefois si grande, offrait, à mon sens, le spectacle suivant :

La patrie n’existe plus. Le chef est crucifié. Il a été remplacé au front par un collège de cinq « défensistes » et de trois bolcheviks qui adressent des appels à l’armée :

« En avant pour la liberté et la révolution… mais sans infliger à l’ennemi une défaite décisive !… » disent les uns.

« À bas la guerre ! Tout le pouvoir au prolétariat ! » clament les autres…

L’armée les écouta quelque temps, demeura d’abord perplexe et finalement… s’en alla à la débandade…