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GÉRARD DE NERVAL

menée jusque-là. Il aurait rendu l’âme, il ne l’aurait pas crachée[1] !

Voilà ce qu’on disait. On ajoutait d’autres choses encore. Malheureusement, il n’en fallait pas douter : c’était de ses propres mains que Gérard avait attaché à son cou le lacet suprême.

Il n’était pas content, on l’a vu ; son roman, fait au jour le jour, ne marchait pas à son gré ; il sentait son intelligence lui échapper et s’épuisait à la ressaisir. Et puis, il faisait froid, la ville était triste. Peut-être aussi avait-il été humilié de sa dernière nuit passée avec des vagabonds, lui, l’honnête homme, avec des coquins, lui le poëte. Et puis encore, sans doute l’amertume de ses souvenirs lui avait paru trop forte, les clous de son cilice amoureux étaient sans doute entrés trop profondément dans son cœur meurtri. On ne sait pas, enfin,

  1. Cette énergique expression, que je m’excuse d’employer, est de Pétrone : Chrysanthus animam ebulliit, dit un des convives du festin de Trimalcion (A. D.)