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GÉRARD DE NERVAL

personne dans la vie, Gérard se faisait de plus en plus hospitalier, doux, et bon. Vous connaissez la devise proposée par Furetière pour l’Académie française : une enclume sur laquelle frappent trois marteaux à manchettes, avec cette devise ; Crebro pulsata nitescit. C’était celle de Gérard : plus la Fatalité l’avait frappé, plus elle l’avait poli. Il n’était pas jusqu’à son style qui ne se fût ressenti de ce châtiment immérité, — si heureux pour nous, ses lecteurs. Les derniers écrits de sa vie ont une vigueur et une nitidité que n’ont pas les premiers : Les Nuits d’Octobre et Aurélie ou le Rêve et la Vie.

C’est alors que je le connus.

Je me trouvais un soir de l’hiver de 1854, seul et un peu mélancolisé par la neige qui tombait, devant une des trois tables du Cabaret de la Canne, sur le boulevard Rochechouart, et devant une bouteille dédaignée. Je rêvassais tout en suivant de l’œil, sur la pierre qui servait de parquet à ce cabaret.