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GÉRARD DE NERVAL

Il disait :


Je suis le ténébreux, le veuf, l’inconsolé,
Le prince d’Aquitaine à la tour abolie :
Ma seule étoile est morte, et mon luth constellé
Porte le Soleil noir de la Mélancolie.

Dans la nuit du tombeau, lui qui m’as consolé,
Rends-moi le Pausilippe et la mer d’Italie,
La fleur qui plaisait tant à mon cœur désolé,
Et la treille où le pampre à la rose s’allie.

Suis-je Amour ou Phœbus, Lusignan ou Byron ?
Mon front est rouge encore du baiser de la reine ;
J’ai rêvé dans la grotte où nage la sirène…

Et j’ai, deux fois vainqueur, traversé l’Achéron :
Modulant tour à tour sur la lyre d’Orphée
Les soupirs de la sainte et les cris de la fée.

Le libraire Tonquet, qui avait publié la satire dialoguée de Gérard de Nerval contre l’Académie et les académiciens, lui avait dit : « Jeune homme, vous irez loin ! » Et, comme l’ajoute avec tant d’enjouement Gérard, le destin avait donné raison à ce brave homme en donnant à son édité la passion