Page:Delphine de Girardin - Poésies complètes - 1856.djvu/314

Cette page n’a pas encore été corrigée


Le présent, l’avenir, pour moi tout est changé ;
Du poids de ses regrets mon cœur est soulagé.
Il n’est plus, ce tourment dont j’étais poursuivie :
Un horizon d’espoir environne ma vie !...
D’un constant souvenir j’aime à subir la loi ;
C’est un secret brûlant que je porte avec moi.
Ce bonheur, dont je suis doucement oppressée,
Comme un parfum des cieux enivre ma pensée.
Tout m’enchante à présent, le silence et le bruit,
L’éclat d’un jour serein, les ombres de la nuit ;
Je brave la retraite et sa langueur profonde,
Et l’uniformité des vains plaisirs du monde.
Pour celle qu’un doux rêve accompagne en tous lieux,
Il n’est plus d’importuns, il n’est plus d’ennuyeux.
Un long récit me plait ; — sans effroi je l’endure,
Et je rêve à ce bruit comme au plus doux murmure.
Je subis des pédants les fatigants débats ;
Je ris de leurs bons mots, — que je n’écoute pas :
C’est l’innocent moyen que mon adresse emploie.
Ah ! le rire souvent sert à cacher la joie !

Et cependant, promise au plus bel avenir,
Mon front est pâle encor d’un triste souvenir ;
Les traces de mes pleurs ne sont point effacées ;
Mon cœur palpite encor de ses craintes passées...
On sourit avec peine après de longs malheurs,
Et tout dit que ma joie est née au sein des pleurs.
Tel l’indocile enfant que pardonne une mère
Oublie en sa gaîté sa douleur éphémère ;
Il joue, — et cependant son visage enfantin
Est pâ1e encor le soir des troubles du matin ;