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Votre rage a des cris, votre haine des armes.
Vous ne vous piquez point de courageux efforts ;
En mots injurieux s’exhalent vos transports.
Vous courez, vous frappez la rivale imprudente
Qui gêne vos amours. — Votre âme indépendante
À de fausses douceurs ne sait point s’abaisser ;
Car vous ne savez point haïr… et caresser,
Et dire à l’ennemie, au démon de votre âme,
Avec candeur : « Comment vous portez-vous, madame ? »

                                ――

Ce supplice mortel dura le temps du bal,
Napoline, en sortant, faillit se trouver mal.
Jamais douleur ne fut plus durement sentie.
Chez elle on l’amena mourante, anéantie.
Sans un amer chagrin elle ne put revoir
Ces lieux, encore empreints de son menteur espoir.
Elle se rappelait sa joyeuse folie,
Son orgueil de se voir si fraîche et si jolie,
Et tous les beaux projets formés par son amour,
Tout ce bel avenir… détruit… et sans retour !
Alors elle éprouva la douleur froide et sombre
D’un matelot qui voit le navire qui sombre.
Point d’espoir de salut  !… plus d’amour, de lien ;
Dans le passé… mensonge ; et dans l’avenir… rien…
Elle ne sentait plus d’élément à sa vie.
Même l’espoir perdu ne lui fait plus envie.
Alfred n’est plus chéri, ni même regretté ;
Il n’éveillerait plus son cœur désenchanté.
Tout manque sous ses pas… le sol, l’air et l’espace.
L’horizon disparaît, le souvenir s’efface.
Sa tête dans ses mains se cache tristement.
Le plus pesant des maux, le découragement,