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Implorent à leur tour cet abri tutélaire.
Alfred et la duchesse, retirés à l’écart,
Derrière un oranger se cachent au regard.
Napoline les voit… elle écoute immobile :
On devine l’amour sans être bien habile ;
Le plus malin sorcier ne vaut pas un jaloux.

La duchesse disait : « Que me demandez-vous ?… »
Et puis elle prenait un air tendre et pudique.

« Demain  ! » reprit Alfred…

                                           Ce mot fut sans réplique.
Elle baissa les yeux, — Alfred saisit sa main,
Et, d’une voix émue, il répéta  : « Demain !… »

Napoline comprit ce coupable langage !
La vierge la plus pure a cet instinct sauvage
Qui lui fait deviner une infidélité.
Tout l’enfer s’alluma dans son cœur agité….

Mais il faut se contraindre et boire le calice.
Quelqu’un vient la chercher pour danser ; ô supplice !
Elle reprend courage… elle cause, elle rit ;
Comme une femme heureuse elle fait de l’esprit :
Elle jette des mots piquants ; — chacun l’écoute ;
Elle est un peu moqueuse, et méchante, sans doute ;
Son esprit excité venge son cœur souffrant :
Le mal que l’un reçoit, c’est l’autre qui le rend.
Oh ! l’on devient cruel quand le cœur se déchire…
Et pour elle, à mon tour, j’écris cette satire ;
Car ces vers insolents ont partis de mon cœur.
Ce sont les cris amers du poète vengeur ! !