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Hier intéressé, — demain sera prodigue.
Ô misérable orgueil qui ne conduit à rien !
Cupidité d’un jour qui dissipe son bien !
Ah ! je vous le répète, et vous pouvez m’en croire,
Un grand peuple, un pays, quelle que fût sa gloire,
Est frappé de démence et d’incapicité,
S’il en vient à.chérir l’argent par vanité !

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Alfred ainsi, marchant dans la commune ornière,
Pour plaire à la duchesse — aspire à l’héritière.
Un brillant mariage assurait son destin,
Près des femmes rendait son triomphe certain.
Séduire une élégante est chose très coûteuse ;
Encor faut-il avoir une mine flatteuse,
Lui donner des bonbons, des bouquets pour le bal ;
Pour suivre sa calèche il faut un beau cheval,
Et tout cela demande une fortune aisée ;
Sinon, de ses rivaux on devient la risée.

Alfred n’était pas né pour se commettre ainsi ;
Son cœur noble à l’amour n’était pas endurci ;
Il était généreux — mais il suivait la pente,
Et, faible, il se mêlait à la foule rampante
Qui cherche la fortune. On brave mille morts,
Mais, pour les vanités, il est peu d’esprits forts,
Et plus d’un grand guerrier, fier comme un roi de Sparte,
Flatta, pour un duché, monsieur de Buonaparte !

Combien je redoutais le jouir, l’instant fatal
Où, dans ce jeune Alfred, tendre, sentimental,
Napoline verrait un fat plein d’arrogance,
Un merveilleux manqué, sans goût, sans élégance ;