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Ne pas voir qu’il troublait l’esprit de cette enfant !
Lui livrer un secret dont rien ne la défend  !
Eh ! quel secret, bon Dieu, jeté dans une vie !
Napoline soudain, de rêves poursuivie,
Voit changer tout son cœur. — Sa tête s’alluma.

Le vieillard tant pleuré, que jadis elle aima
Avec un saint respect, n’est plus pour elle un père,
C’est le mari trompé d’une femme légère.

Elle se rappelait les fêtes d’autrefois,
Et l’Empereur chéri, ses gestes et sa voix.
Il lui souvint qu’un jour il dit, s’approchant d’elle,

« Allons, regardez-moi ; l’on dit, mademoiselle,
Que vous me ressemblez. »

                                          Et puis bien tendrement
Il l’avait embrassée.

                              Ô joie, enchantement !
Cette main qui tenait entre ses doigts le monde
Un jour a caressé sa chevelure blonde ;
Napoline a senti sur son front enfantin
Ces lèvres qui donnaient des ordres au destin.
Il a vanté sa grâce et sa beauté gentille ;
Et, lorsqu’il l’emhrassait, il a pensé « Ma fille ! »

Oui, cette idée a dû troubler tes jeunes ans ;
Elle a dû te dicter des rêves séduisants,
Napoline ! Souvent, dans tes désirs de gloire,
Pour son jeune héritier tu rêvas la victoire.
Tu ne prévoyais pas qu’il serait rappelé,
Comme toi, jeune à Dieu… qu’il mourrait exilé ;